Lettre ouverte à la ville de Gaspé : le règlement sur l’épandage de produits chimiques de la ville de Gaspé reste valide en juridiction fédérale.

Monsieur Sébastien Fournier

Directeur général

Ville de Gaspé

25, rue de l’Hôtel de Ville

Gaspé (Québec) G4X 2A5

Direction.generale@ville.gaspe.qc.ca

c.c. Monsieur Daniel Côté

Maire de la Ville de Gaspé

daniel.cote@ville.gaspe.qc.ca

Conseil municipal de la Ville de Gaspé

le 24 août 2020

Objet : Réponse à la lettre de monsieur Fournier du 22 juillet 2020

Monsieur le directeur général,

La présente fait suite à votre correspondance du 22 juillet 2020 relativement à des plaintes contre la Société du chemin de fer de la Gaspésie, concernant l’épandage d’herbicides sur la voie ferrée, ce qui est interdit par le règlement municipal numéro 597-95 de la Ville.  Dans votre lettre, vous soutenez : « …la Société respectant la réglementation fédérale et provinciale, nous croyons que leurs réglementations ont préséance sur la nôtre. » Nous désirons vous démontrer que ce règlement est toujours applicable et opérant. Nous détenons plusieurs documents qui permettent de soutenir l’application intégrale du règlement 597-95.

Nous tenons à vous faire part premièrement de certains extraits contenus dans le jugement prononcé par l’honorable Gilles Gaumond, juge municipal à la Cour municipale de la Ville de Québec (2013 QCCM 223). On lit aux points 16 et 20 qu’un règlement municipal qui ne touche pas à une partie essentielle ou intégrante de l’entreprise fédérale et qui ne restreint pas le contenu vital et essentiel de l’entreprise fédérale est applicable. (Il est évident que c’est le cas du règlement 597-95, car il ne fait que décréter le type de méthode à utiliser.)

Le même argument se trouve dans la lettre rédigée par monsieur Jocelyn Villeneuve, coordonnateur à l’urbanisme, à l’environnement et au développement de la Ville de Gaspé, datée du 21 juin 2006. La lettre s’adresse à madame Diane le Houillier de la Société du chemin de fer du Québec. En voici un extrait : « …l’entreprise fédérale est assujettie à la réglementation municipale en autant que cette dernière n’a pas pour effet de l’empêcher d’exercer ses activités… (droit municipal principes généraux et contentieux, point 8.184…) …le règlement numéro 597-95 de la Ville de Gaspé n’empêche pas d’exercer votre activité de contrôle de la végétation, ce règlement ne fait que décréter la procédure applicable pour de tels travaux. » La lettre se termine en demandant le respect intégral du règlement 597-95. 

Donc, la Ville de Gaspé sait depuis 2006 que la juridiction fédérale n’interfère pas avec le règlement 597-95, ce qui est étayé par les extraits ci-haut du jugement 2013 QCCM 223. 

La réglementation provinciale n’interfère pas non plus avec le règlement 597-95. Dans la lettre adressée à madame Margret Grenier, présidente du Comité de protection de la santé et de l’environnement, datée du 9 juin 2006, monsieur Jean-François Bourque du ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec, Service des pesticides, explique la relation entre le Code de gestion des pesticides et la réglementation municipale. En voici des extraits : « La Loi sur les pesticides n’interdit pas à une municipalité de réglementer en matière de pesticides. » L’article 102 de cette loi énonce que : « Toute disposition du Code de gestion des pesticides et des autres règlements édictés en vertu de la présente loi prévaut sur toute disposition inconciliable édicté par une municipalité… » « Selon nos informations auprès du Service juridique, seul un juge peut juger du caractère inconciliable d’une disposition municipale… » … « La Loi sur les pesticides ne précise pas les secteurs où les municipalités peuvent réglementer ou non. L’entrée en vigueur du Code de gestion des pesticides en avril 2003 ne rend pas inopérant les règlements municipaux dans les corridors de transport d’énergie… » 

Cet argument se retrouve dans la lettre rédigée par monsieur Jocelyn Villeneuve, coordonnateur à l’urbanisme, à l’environnement et au développement de la Ville de Gaspé, datée du 19 juin 2006, adressée à madame Marie-Claude Trottier, chef relations avec le milieu et projets spéciaux, Hydro-Québec. En voici un extrait : « …le règlement 597-95 de la Ville de Gaspé n’ayant pas été jugé inconciliable jusqu’à présent avec le code de gestion des pesticide, ce règlement est toujours en vigueur et nous vous demandons donc, par la présente, de respecter ce dernier intégralement… »

Enfin, le 21 juillet 2006, madame Carole Grenier, conseillère politique au Cabinet du ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs du Québec, adressait une lettre à monsieur Jocelyn Villeneuve, coordonnateur à l’urbanisme, à l’environnement et au développement de la Ville de Gaspé. La lettre conclut : « Il est à noter que le fait d’établir une réglementation plus restrictive que ce qui est inscrit dans le Code de gestion des pesticides ne constitue pas une disposition inconciliable avec celui-ci. » 

Nous précisons que les versions mises à jour en 2020 de la Loi sur les pesticides et du Code de gestion des pesticides demeurent inchangées quant aux citations ci-haut. 

Donc, la Ville de Gaspé sait depuis 2006 que les réglementations provinciales et fédérales n’interfèrent pas avec l’application du règlement 597-95. 

Finalement, plusieurs reportages parus dans le journal électronique Graffici, dans le journal le Havre et dans le bulletin électronique Gaspésie, pour ne nommer que ceux-là, témoignent de 2011 à 2013 de la validité du règlement municipal de la MRC du Rocher-Percé. En effet, la Société du chemin de fer de la Gaspésie était contrainte de payer des amendes à la MRC pour avoir enfreint l’interdiction d’épandre des produits chimiques sur la voie ferrée. Le libellé du règlement de la MRC du Rocher-Percé est différent de celui du règlement de la Ville de Gaspé, mais le but est le même, soit d’empêcher l’utilisation d’herbicides dans les corridors de transport ferroviaire, routier, d’énergie et dans la Ville de Gaspé, aéroportuaire également. 

Donc, en conclusion, ni la réglementation fédérale ni celle du Québec n’a préséance sur le règlement 597-95. Nous vous demandons de l’appliquer dorénavant, car la Ville de Gaspé possède un outil légal conçu et adopté pour protéger la santé et l’environnement, surtout ceux de nos enfants. Il serait inconcevable d’enlever cette protection à la population.

Vous remerciant, nous vous prions d’agréer, monsieur le directeur général, l’expression de nos sentiments les meilleurs.

P.j. 

Margret Grenier

Présidente, Société de conservation ZICO de la Baie-de-Gaspé

sczbg@globetrotter.net

Pascal Bergeron

Porte-parole, Environnement Vert-Plus

comm.evp@gmail.com